Le terme Grandes Découvertes évoque dans l’imaginaire collectif, de nouvelles terres, de nouveaux peuples, animaux ou plantes médicinales. Quant au point de vue alimentaire, on ne pense souvent qu’au cacao et à la canne à sucre. Il est intéressant de questionner notre entourage. D’où est originaire la tomate? La pomme de terre? Est-ce que les gens vous citent « le Nouveau Monde » ? C’est là que l’on comprend un enjeu historique issu des Grandes Découvertes souvent passé sous silence. Les Européens ont souvent une vision euro-centrée, et il en est de même pour la Cuisine ; l’histoire permet de nous mettre face à une nouvelle réalité.
Paru dans la revue L’Histoire « Le goût de l’inconnu » traite, comme son auteur nous l’indique, de la “mondialisation de l’alimentation’, apparue à la fin du XVe siècle, au cœur de la période des Grandes Découvertes. La diffusion de végétaux étrangers en Europe date de l’époque médiévale, venant d’Asie ou d’Afrique. Néanmoins, l’année 1492, année du premier voyage de Christophe Colomb aux Amériques, marque un tournant décisif. Les colons reviennent en Europe accompagnés de nouveaux mets, avec des formes et des goûts insoupçonnés, qui deviennent objets de curiosité. Quel a été l’impact de l’arrivée de ses nouveaux végétaux en Europe
La société du XVe siècle en Europe est partagée entre un souci de conservatisme et par l’envie de découvrir et d’apprendre toujours plus, que ce soit à grande échelle lors de nombreuses expéditions où l’on « découvre » de nouvelles terres, ou à petite échelle (celle qui nous intéresse) à savoir la découverte de nouveaux animaux et de nouvelles plantes. Ces plantes récemment découvertes (on compte le maïs, la pomme de terre, la tomate, le piment, le cacao…) peinent dans un premier temps à se faire accepter. A cette époque, les aliments sains étaient tout simplement les aliments connus et poussant sur les terres européennes. Les fruits et légumes du Nouveaux Monde représentaient l’exact opposé, sont-ils alors bons pour des occidentaux? Leurs propriétés nutritives étaient inconnues, ils ne provenaient pas des terres occidentales, étaient mangés par des « sauvages non christianisés ». Ces nouveaux végétaux se sont vus qualifier de nocifs, malsains, responsables de troubles digestifs, ou encore transmetteurs de nouvelles maladies… Cependant, après ce long refus un nouveau mouvement va permettre l’acceptation de ces nouveaux végétaux: l’analogie.
Pour se rassurer et pour européaniser ses nouvelles plantes, elles seront assimilées à d’autres déjà connues (maïs: gros épi de céréales), même si le lien n’est pas des plus évidents et même si cela peut nuire aux fruits ou légumes en question (pomme de terre associée à la mandragore, plante des sorcières. Les nouvelles plantes deviendront ornementales, potagères ou de simples curiosités.Le sort de ces plantes est en fait lié à la tradition populaire culinaire des différents pays européens. Les populations occidentales ne mangent pas exotique mais intègrent pleinement les nouveaux fruits et légumes dans leur alimentation. Avec le temps, elles vont peu à peu se substituer aux aliments traditionnels, jusqu’à faire partie intégrante de leur culture culinaire à travers les siècles: la culture provençale (tomates), belge (frites), languedocienne (cassoulet).On voit alors se développer un véritable marché. D’un côté, de nouveaux produits sont importés et appropriés (chocolat européanisé), d’un autre, les Occidentaux exportent leur nouvelle cuisine et leur technique (friture).
Pour plus d’information, lisez le merveilleux texte de Florent Quellier (L’Histoire, N°355, juillet-août 2010, PP.98-10).